• Écrit le 13/2/2016

     

    Délicieuse enfant de Fanny LalandeDélicieuse enfant est décrit comme un huis clos mais n'en est pas vraiment un. À vrai dire, je vais être sèche mais cette histoire n'a rien pour elle... J'avais lu la fin comme il m'arrive souvent et avait découvert le dénouement qui m'avait poussé à continuer l'aventure jusqu'au bout malgré toutes les ombres. Et cette fin est mal amenée, n'a que peu d'éléments qui s'y réfère et semble tout d'un coup tout droit sortie du néant. Comme si l'auteur avait pensé à ce twist dans les derniers chapitres. La narration est passable mais il ne se passe rien, ou presque, pendant plus de la moitié de l'histoire et ensuite, on arrive dans une succession navrante d'actions répétitives et agaçantes.

    De plus, le personnage se prend pour un grand cuisinier et on a de longs moments où il passe son temps  nous décrire une recette de cuisine. Si je voulais en lire une, ce ne serait pas dans un roman. Et certainement pas de manière aussi agaçante.

    Quant au héros... Eh bien, non je ne peux pas m'attacher à un égoïste narcissique qui se croit mieux que tout le monde et qui tient à tout contrôler. Il passe son temps à faire l'apologie de sa propre personne et à s'énerver contre les siens car tout ne se déroule pas comme il l'avait prévu. Il se révèle même psychopathe sur les bords par instant juste pour tout contrôler. Et ça paraît tellement normal. Il n'en a presqu'aucun problème.

    Bref, une déception sur toute la ligne.


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  • Histoire d'os

    Un regard vers ses jambes galbées et le serveur ne put s'empêcher de sourire. Il n'ignorait pas que d'autres clients attendaient avec hâte leurs commandes, de payer ou encore d'être simplement placé à leurs tables. L'homme n'avait pourtant d'yeux que pour ces jambes à la peau hâlée, ces courbes fines, cette façon dont elles se croisaient, faisant ressortir quelques grains de beautés découverts grâce à l'absence du moindre poil disgracieux.

    Héloïse savait cela parfaitement et c'était la raison pour laquelle elle enfilait toujours des collants judicieusement choisis ou des talons qui rehaussaient le galbe de ses cuisses. On la servait souvent en premier lorsqu'on ne lui offrait pas gratuitement des choses, ou qu'on ne lui faisait pas de réductions. D'autant plus les jours où elle mettait un short ou une mini-jupe.

    Héloïse souriait en prenant le verre que lui avait payé un autre client. Elle lui fit un clin d'œil et déplaça légèrement ses jambes, sachant qu'il suivrait ce mouvement du regard. Elle l'avait déjà capturé, il lui resterait ensuite le choix de le faire sien ou pas.

    On pouvait médire, la pointer du doigt en l'insultant de tous les noms, elle s'en moquait. Ses jambes étaient son plus bel atout…

    µµµ

    Stanley servit un troisième verre à cette demoiselle qui exhibait sans arrêt ses jambes. Il ne pouvait s'empêcher de suivre chacun de ses mouvements.

    Dans la rue, son regard était toujours attiré par les jambes des passants hommes et femmes confondus. Plus elles étaient longues, plus il les aimait. Mais elles ne devaient pas être trop épaisses ou musclées non plus ! Si ses yeux étaient toujours happés par les courbes divines, il n'était pas facile de le séduire non plus.

    Alors cette belle à qui il offrait des verres… Elle, c'est qu'elle avait vraiment des jambes particulières.

    Il ne cessait de la regarder, attendant le moment où elle paierait son addition. Lui avait déjà réglé la sienne, se contentant de reprendre de temps à autre un café contre un euro cinquante qu'il donnait directement. Il voulait s'en aller dès qu'il le souhaiterait pour venir à la rencontre de cette inconnue.

    Aussi, lorsqu'elle entama une tarte aux pommes, il se leva et sortit. Il vit le regard de la femme le suivre et s'évertua à avoir une démarche assurée pour qu'elle garde son intérêt. Qui aimerait un homme qui portait des lunettes crasseuses, qui n'avait pas tant d'argent que cela et qui vivait dans un appartement rempli en grande majorité de réfrigérateurs pour conserver le surgelé ?

    Il s'appuya contre le mur en supposant que même son travail de vendeur dans une chaîne de restauration rapide n'avait rien de séduisant.

    Il était habitué à cela… Il n'avait rien d'attirant, rien pour lui mais il aimait le genre de personnes qui pouvait avoir tout le monde. Pourquoi alors se contenter d'un homme aussi peu intéressant que lui ?

    µµµ

    Héloïse sortit du restaurant et sourit en reconnaissant celui qui lui avait servi cinq verres. C'était à cause de lui si ses joues étaient roses et si elle souriait autant. De près, elle remarqua ses boutons et comme ses cheveux étaient hirsutes. Néanmoins, elle s'approcha.

    – Merci pour les verres.

    – De rien. Je vous trouve très charmante…

    Elle sourit, ravie des compliments. D'autant plus lorsqu'ils étaient prononcés en la regardant dans les yeux au lieu d'observer ses courbes. C'était suffisamment rare pour qu'elle le note et qu'elle revienne sur ses primes idées. Elle n'allait pas l'éconduire à l'instar de tous les autres. Rien qu'une fois, elle pouvait garder dans ses filets un homme qu'elle trouvait disgracieux…

    Qui le saurait ?

    µµµ

    Au petit matin, Stanley se leva de sa chambre et observa le sol en soupirant. Pas de petite culotte ou de soutien-gorge. Pas plus de préservatifs abandonnés sur le tapis après avoir passé une nuit exquise.

    Il quitta la pièce et se rendit vers le salon où des réfrigérateurs aux portes vitrées étaient étalés sur tous les murs. Il se laissa tomber dans le seul meuble du lieu : un minuscule fauteuil. Il posa ses mains sur l'accoudoir et observa la nouvelle paire de jambes en vitrine.

    Celles d'Héloïse.

    Son nouveau trophée.

    Quelles étaient somptueuses sans toutes ces choses inutiles autour. Un tronc, des bras, une tête ? Il ne pouvait empêcher un rictus de marquer ses lèvres dès qu'il pensait à cela. Lui-même était muni de ces membres disgracieux mais puisque ses jambes étaient aussi désespérément moches que lui, il supposait que ce n'était pas un vrai problème…

    Il laissa ses yeux courir d'une porte de réfrigérateur à l'autre, ses lèvres souriant en revoyant les belles jambes d'Héloïse en action. Puis il coula le regard vers celles de Monique à la peau si foncée, au galbe si gracieux. Il s'attarda un instant sur celles d'Alonzo… Il ne savait pas lesquelles il préférait. Elles étaient toutes tellement merveilleuses. Il se rêva marionnettiste pour pouvoir tirer sur des ficelles et reproduire les mouvements féériques de ces membres divins.

    Il se figura, juste un instant, un autre univers. Goûta au plaisir sourd de son monde de fantasme…

    Stanley avait dû s'arracher à la chaleur de son appartement, havre de mille histoires, pour s'enfoncer dans la triste réalité. Traversant des rues insipides dans un froid mordant, il ne pouvait s'empêcher de jeter des regards vers les kiosques à journaux quand il passait devant. Il n'en achetait presque jamais mais valait mieux s'assurer qu'il ne faisait pas la Une.

    C'était déjà arrivé. Ça arriverait forcément à nouveau.

    On ne lui attribuait pas tous les meurtres. Il ignorait s'il devait s'en sentir vexé ou pas…

    Toujours est-il qu'à force d'arranger ses idées, il arriva au supermarché. Il troqua sa tenue contre l'horrible uniforme qu'il devait toujours revêtir. Et c'était parti. Huit heures loin de ses fééries personnelles. Là, il devrait supporter de voir des jambes qu'il ne pourrait peut-être jamais toucher. Ou, pire, des jambes moches !

    À cette simple idée, il ne put s'empêcher d'avoir une moue de dégoût.

    µµµ

    Quelles jambes…

    Stanley leva le visage pour s'adresser à la cliente mais ne put que serrer les dents. Elle n'avait rien d'attirant. Une poitrine exubérante mise en avant par un corset échancré, des cheveux peroxydés, un maquillage à outrance. Il s'empressa de la saluer pour recommencer à observer ses cuisses, ses mollets même ses chevilles malheureusement enfermées dans des bottes.

    Cette vision s'arracha trop vite à lui alors qu'elle s'éloignait, après un rapide paiement, pour partir sur le parking. Il ne pouvait lâcher ces somptueux membres du regard et sourit en les voyant partir vers les emplacements à l'arrière du bâtiment. Il n'y avait presque personne là-bas.

    Il ignora la vieille qui lui souriait en lui tendant la carte du magasin et se leva.

    – Mais ? s'étonna-t-elle.

    Stanley s'empressa de sortir et marcha rapidement vers l'arrière du supermarché. Il enfonça sa main dans sa poche pour sortir son couteau suisse.

    Il tourna.

    Une gerbe de sang éclaboussa les murs.

    – Merde…

    Un long soupir emplit l'air qui était soudainement devenu silencieux. Plus un seul pépiement dans les arbres. Plus un bruissement dans les feuilles. Comme si l'univers lui-même attendait.

    – Tant pis. Au moins, ses mains ne sont pas abîmées.

    Mallory arracha les mains de Stanley à son cadavre et les fourra dans son sac à main avant d'aller dans sa voiture.

    Voilà qui serait merveilleux pour sa collection.


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  • Tosa Yumoto avançait dans un paysage fleuri, faisant sauter six pièces d'argent dans sa main. Un sourire suffisant ornait ses jolies lèvres alors que ses lunettes glissaient sur son nez empâté. Dans cette plaine somptueuse, presque idyllique, il sentait les bonnes odeurs de fleurs, entendait les oiseaux pépier. Même le vent, filtré par les roches était doux, agréable. Une promenade comme on en faisant rarement…

    Ses pas le menèrent naturellement vers un fleuve dont le glouglou flottait jusqu'aux oreilles attentives.

    Plus il s'en rapprochait, plus il pouvait apercevoir un grand arbre se dessiner, uniquement composé de petites fleurs rose pastel.

    Il fit sauter une nouvelle fois ses pièces comme il passait sous une branche mais ne les sentit pas dans sa paume. Il leva le nez, juste à temps pour voir une créature bondir devant lui. Elle faisait deux mètres de haut et se penchait sur lui, le reniflant. Sa peau grise collée à chacun de ses os était bien la seule chose qui la différenciait d'un squelette. Ça et ses yeux rouges braqués sur lui. Sa longue chevelure blanche était tel un linceul, couvrant sa poitrine tombante, ses genoux cagneux.

    – Six pièces de monnaie.

    – Parfait… souffla une voix caverneuse.

    Yumoto recula d'un pas, glissant le regard vers la gauche. De derrière le tronc noir, sortait un vieillard qui ne faisait pas un mètre. Petit, chétif, sa peau était rouge et épaisse, comme un homard qu'on aurait passé à l'eau bouillante.

    La femelle tendit sa main crochue et la ferma sur l'homme. Elle lui arracha ses atours alors que le voyageur cherchait à se débattre. Des efforts bien vains. Malgré ses bras cadavériques, elle avait une telle force ! Il était comme un enfant qui ne pouvait que se laisser faire…

    Ses habits étaient à peine ôtés que la femme les jeta à son petit compagnon. Il renifla et suspendit les vêtements à une branche basse. Il s'essuya le nez avec sa manche alors que Yumoto grelottait devant la vieille. Le vent était soudainement frais, comme s'il répercutait sa frayeur sourde.

    Le nain se frotta encore le nez en observant la branche pliée. Il opina d'un mouvement bref vers la mégère qui attrapa Yumoto par les cheveux. Elle le traîna au-dessus de l'eau, là où grouillaient des serpents sifflants et ondulants.

    Lui, bien portant, la peau joliment hâlée, le regard fier, vit un reflet qui n'avait rien de cela. Petit, chétif, blême et orné de nombreuses marques bleues ou violines. La vieillarde se passa la main sous le menton.

    – Mari abusif, hein ?

    Yumoto déglutit difficilement. Il pouvait bien essayer de se soustraire à ces doigts de glace, il n'en avait pas la force. Que pouvait-il faire d'autre qu'opiner lentement, avouant enfin tout ce qu'il avait fait à sa pauvre femme ?

    – Toute ta vie, tu as battu ton épouse.

    – Pas… Pas toute ma vie, se défendit-il, mollement.

    – Pas toute sa vie, ricana l'homme.

    La femelle le poussa sur une grosse pierre. Un bruit de craquement s'éleva dans la plaine, porté par le vent. Yumoto hurla son mal.

    Le couple ne s'en soucia guère et vint sur lui. Ils frappèrent, frappèrent et frappèrent.

    La victime se couvrit de bleu, son squelette se brisa. Ça ne dura pas deux minutes entières mais il jura y passer toute l'éternité. Cette douleur. Ce feu qui montait en lui, léchant chacun de ses os, de ses muscles, le laissant avec l'impression que plus jamais il n'aurait l'opportunité d'être soulagé.

    La vieille l'attrapa par les cheveux et l'obligea à se redresser sur ses jambes fracturées. Il tenait à peine debout, mais on le poussa vers la rivière…

    – Pas les s…

    – Mari violent, mais pieux travailleur, commenta le mâle d'un air moqueur.

    – On aimait plus son prochain que sa prochaine ? susurra sa compagne.

    – Ah… Malheureusement…

    – Malheureusement… reprit-elle.

    Elle bouscula Yumoto qui se vit tomber vers les flots. Lorsqu'il crut qu'il allait sombrer au milieu des serpents, il s'écrasa violemment contre un gué de pierre légèrement immergé. Il lança un regard vers le pont de platines surmonté de garde-fou de diamant aux dorures d'or, rehaussé de saphir, rubis et améthyste. Jamais il n'aurait pu monter le marchepied de marbre qui s'érigeait plus loin au-dessus de l'eau clapotante mais comme il aurait souhaité l'emprunter…

    Au moins, il n'était pas précipité dans le flot de serpents qui sifflaient pourtant dans sa direction. Désireux de plus. Désireux de chairs.

    Tosa Yumoto rampa alors, cherchant le salut de l'autre côté du gué. Le fleuve des trois chemins…

    – Les pauvres petits…

    La mégère attrapa un vieux rôti dont elle arracha des morceaux qu'elle jeta aux reptiles.

    – La prochaine fois, Datsue-ba… La prochaine fois, ils auront de la bonne chair. Le Monde se corrompt. Rares sont ceux qui traversent le gué.

    – Et puis, Keneō, roucoula-t-elle, les accidents sont si vite arrivés.

    Ses yeux roulèrent sur ce petit chemin immergé où un serpent s'engageait…


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