• La Chimère : Chapitre 6

    Chapitre 6 : Faustine Sautifen.

     

                Faustine Sautifen, vingt-six ans, enseignante de profession, écrivain de vocation. Née le 11 Juin 1988 à Huy. Elle grandit péniblement à Amay, petite ville de campagne. Elle étudia à Huy jusqu’à ce qu’elle soit acceptée à l’université de Liège. C’est là qu’elle accomplit, avec fruit, ses études de biologie. Elle fit quelques années professorales à Namur, désireuse de fuir Huy.

                Elle s’installa à Malonne, coquette petite ville où elle se sentait bien. Elle ne devait faire que quarante minutes de route quotidienne pour pouvoir travailler dans l’école de Jambes où elle travaillait assidûment. Pour elle n’existait que son travail et sa passion. Elle ne sortait que rarement de chez elle.

                Ce qui lui fallait tous les quolibets de ses voisins.

                Heureusement, elle s’en moquait.

                Faustine aimait : Ecrire sur son ordinateur avec une tasse de café, voir la beauté des orages et le bruit que faisait la musique dans ses oreilles. Par contre, elle n’aimait pas : le bruit des marches qui craquent lorsqu’on les grimpe, les chaudes journées de printemps et ce silence alambiqué entre deux morceaux de musiques.

                La jeune femme était dans la salle des professeurs, à son bureau. Elle ne se mêlait pas aux autres professeurs, n’appréciant pas ces sentiments forcés. Elle ne les connaissait et n’était pas sûr de le vouloir. Eux-mêmes n’en avaient rien à faire l’un de l’autre.

                C’était juste agréable d’avoir des personnes qui étaient prêt à écouter vos explications et votre vie morose en faisant semblant qu’ils aimaient ça. Juste par pure politesse.

                Elle ratura encore une fois une réponse d’un de ses élèves. Elle n’en avait pas encore trouvé un seul qui avait trouvé la bonne réponse à « que transporte les globules rouges ». C’était pourtant si facile. Mais elle ne pouvait mettre que, au mieux, des demi-points pour une réponse à moitié complète.

                Elle se passa la main dans les cheveux avant de boire nerveusement à sa tasse de café. Elle était bien trop petite, bue en seulement six gorgées. Mais elle était obligée d’avouer que ce n’était pas un mal puisque ce breuvage était particulièrement imbuvable.

                Une adolescente s’approcha d’elle. Longues jambes gracieuses enfermées dans des collants psychédéliques, taille fine et svelte, hanches et poitrines inexistantes mais un visage particulièrement délicat. Sa peau d’une pâleur satinée était couverte de vêtements roses, fins, délicats. Elle avait tout ce qu’on retrouvait chez les mannequins. Le sourire en plus. Dotée de yeux d’un vert pomme séduisant, elle possédait également une très longue chevelure blonde platine qui semblait presque blanche.

    - Tu continues de faire ça ?

                Elle fit discrètement signe à la personne de s’éloigner, prise dans ses corrections. La voix de cette adolescente gracieuse était presque masculine.

    - Je m’ennuie, tu sais… on pourrait travailler.

    - Pas aujourd’hui. Chuchota Faustine. Je suis vraiment occupée là.

    - Bien.

                Elle s’assit sur le bureau avant de regarder vers la porte, agitant ses jambes comme une enfant.

    - Oh ! C’est lui !

                Faustine releva la tête. Elle vit alors rentrer Jean-Marc, l’air particulièrement agacé. L’adolescente sauta au sol et vint jusqu’au professeur de français. Elle lui tourna autour en souriant. L’homme avançait sans la voir. L’enseignante serra même les dents lorsque Jean-Marc… traversa littéralement la jeune femme.

    - Argh… je déteste quand on fait ça. Surtout que je vois pas à travers leurs vêtements…

                Faustine se passa la main sur le visage puis revint à ses corrections. Si elle ne passait pas pour une folle en hélant une chose qui ne vivait que dans son imagination, elle lui aurait demandé de venir la rejoindre et de se préoccuper des fleurs qui fanaient sur son bureau.

    - Il est d’humeur ronchonne aujourd’hui… pourquoi tu viens pas lui remonter le moral ?

    - Cet homme m’insupporte. Pensa Faustine d’un ton venimeux.

                Elle savait que sa création, sa confidente, sa seule amie, l’entendrait. L’adolescente sautilla autour de Jean-Marc une dernière fois avant de revenir vers Faustine, souriante. Elle s’assit sur le bureau puis se mit en tailleur.

    - Matthias… combien de fois devrais-je te faire remarquer qu’une fille ne s’installe pas de la sorte.

    - Ah !

                La jeune fille gracieuse, qui s’avérait être un homme, remit ses cheveux en ordre d’un geste délicat avant de s’asseoir d’une façon bien plus féminine.

    - Comme ça ?

                Faustine opina faiblement. Elle tendit la main pour prendre son stylobille rouge. Mais, à cet instant précis, une main passa contre la sienne. Elle sentit un choc statique particulièrement désagréable. Elle leva les yeux pour voir que c’était Jean-Marc qui l’avait touchée.

                Elle siffla en tirant sa main en arrière. L’homme eut un sourire sarcastique.

    - Je n’ai plus rouge, je voulais emprunter le votre, mademoiselle Sautifen.

                Faustine le sentait presque dédaigneux alors qu’il soufflait ses mots. Elle relâcha pourtant le rouge dans elle avait besoin pour qu’il puisse le prendre. Elle le regarda s’éloigner, les bras ballants.

    - Mais tu en as besoin de ce truc ! Tu vas pas lui laisser ! Protesta Matthias.

                Il marcha jusqu’à Jean-Marc et essaya de récupéra le stylobille. Mais son corps n’existait que dans l’esprit de sa créatrice. Elle n’était même pas sûre que ce n’était pas elle qui contrôlait cette apparition si gracieuse, si peu masculine. Elle aurait voulu pouvoir se lever, avoir la force de Matthias, récupéré ce qui était à elle.

                Au lieu de quoi, elle réarrangea les pétales de la pâquerette qui perdait un à un ses pétales.

    - Rend. Ça. Cria le travesti.

    - Matthias. Soupira mentalement Faustine.

                Une décharge désagréable la parcourut entièrement. Elle vit Jean-Marc frémir avant qu’il ne pousse un cri. Il montrait quelque chose que personne ne pouvait voir. L’enseignante fronça les sourcils.

                Il y avait bien une personne qui pouvait voir ce qu’il montrait.

    - D’où vient cette fille ?!

                Il désignait quelque chose, le doigt tremblant. Elle entendait les commentaires désobligeant de sa création.

    - Il me pelote, non ? C’est bon signe, ou bien ? Demanda le travesti vers Faustine.

                Jean-Marc poussa un autre cri, récupérant sa main. Tous les regards étaient rivés vers lui, comme s’il était fou.

    - Je vous jure… il y a cette fille ! Juste devant mon bureau.

    - … Pas une fille… Matthias…

     

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