• 5
    Carmin.

     

    Hunter lança un regard à l’horloge. Le temps d’aller à l’école se rapprochait. Il pensa alors à faire quelque chose qu’il avis omis jusqu’à présent : vérifier qu’il n’avait pas de sang sur lui. Il espérait que s’il en avait, on avait pris cela pour du ketchup ou de la sauce tomate.
    Il sentit un long soupir quitter ses lèvres lorsqu’il remarqua des tâches sanguines sur son t-shirt. Il s’éloigna alors pour regagner la rivière. On n’avait pas le droit d’y descendre mais il y avait un endroit où l’eau touchait les galets, juste suffisant pour que les enfants y jouent sous la surveillance de leur parent.
    Ou, comme dans son cas, puisse faire un peu de lavement. Il vérifia qu’il n’y avait personne autour de lui puis ôta son haut. Il le mit dans l’eau claire et gelée commença à frictionner ses vêtements jusqu’à ce que toutes traces rouge eut disparu. Il étendit son t-shirt et attendit qu’il sèche. Il faisait assez froid et il espérait grandement ne pas se refroidir. Il ne tenait pas à inquiéter Camile avec quelconque maladie. Il lui causait certainement déjà assez d’appréhension.

     

    Lorsqu’il fut un peu plus de dix-sept heures, Hunter enfila son haut puis décida de rentrer. Pour faire un peu plus « vrai » il se rendit jusqu’à l’école puis fit volte-face et repartit vers la maison. Il perdait du temps, faisant du sport et donnait l’impression d’avoir été suivre ses cours. Mais il s’enfonçait aussi beaucoup plus dans les méandres des mensonges.
    Il s’arrêta devant une bijouterie pour regarder l’heure qui y était affichée : dix-sept heures vingt-six. Il pouvait vraiment rentrer à présent. Il se rendit alors jusqu’à l’immeuble. Il y entra grâce à ses clés et grimpa les escaliers à pied pour arriver encore plus tard et que Camile ne se doute de rien. Il devait être dix-sept heures trente-trois ou peut-être un peu plus, lorsqu’il arriva devant la porte de leur appartement.
    Il inspira de l’air puis ouvrit la porte. Il s’avança alors dans le salon, un sourire presque naturel aux lèvres.
    Camile était assis dans le divan, fixant la télé éteinte. Dès qu’il entendit la porte s’ouvrir, il releva la tête pour darder son fils de son regard plus inquiet qu’en colère. Même s’il avait voulu s’énerver, c’était l’angoisse qui avait gagné la bataille. Comme trop souvent.
    - Re-bonjour maman. Tu as passé une bonne journée ?
    - Non.
    - Non ? S’inquiéta Hunter.
    L’homme au foyer se leva et il croisa les bras. Il planta le ciel ennuagé de ses orbes bleu clair dans son océan encre.
    - Tu sais que l’école sait appeler les parents quand les élèves sèchent… Commença-t-il lentement. Par deux fois les cours ! Cria-t-il.
    Le petit malade couina. Le moment était venu de compter le nombre de mensonge qu’il pouvait dire à l’adulte. Il savait bien qu’il en proférait une quantité. Il pourrait aussi savoir après combien de ses calembredaines, « sa mère » commencerait à le détester exactement.
    Il pariait sur dix.
    Ce serait bien suffisant pour que Camile ne veuille plus jamais lui adresser la parole. Pour qu’il ne recherche plus le réconfort auprès de lui. Pour que demain soir, « sa mère » ne vienne pas le voir, anxieux, pour qu’ils partagent le lit ensemble.
    - Pourquoi ?! Pourquoi n’es-tu pas aller à l’école ?
    Parce qu’il devait se venger.
    - Pour rien, maman.
    Un.
    - Pour « rien » ? C’est une excuse valable ? Quitte à me mentir tu devrais essayer d’en trouver un qui ait le mérite d’être proférer !
    - J’en ai marre des cours.
    Ça, ce n’était pas tout à fait un mensonge.
    - Marre des cours… marre des cours ! Tu n’en as jamais eu marre des cours ! Et depuis une semaine, tu en as marre ?!
    - Oui… c’est moins passionnant…
    Ça, par contre, ça faisait deux. En Français et en informatique, la matière était particulièrement captivante.
    - Ce n’est qu’une passade ! Ça va revenir ! Tu sors… tu… il pourrait t’arriver des soucis ! Tu pourrais te blesser sans même le voir ! S’écria Camile en gardant toutefois une distance de sécurité entre eux.
    Hunter sentait sans mal que son parent avait envie de se jeter sur lui pour vérifier qu’il n’était blessé nulle part. S’il surveillait ses blessures potentielles, ils pourraient éviter une mort par hémorragie dont Junior ne se serait pas rendu compte.
    - Est-ce que c’est la même chose avec la natation ? Toi qui aimait tant ça ?!
    - Je n’avais pas envie aujourd’hui.
    Trois.
    - Où étais-tu ?!
    - Je me baladais.
    Et de quatre.
    - Tu te… tu… Qu’est-ce qui ne va pas ?! Une semaine que tu agis de la sorte ? Est-ce que tu as quelque chose à redire ?! Sur quoi que ce soit !
    - Non maman…
    Et de cinq. Puisqu’il ne supportait plus que Camile attende quelque chose qui n’arriverait plus jamais.
    - Tu… tu vas aller prendre ta température… vérifier que tu n’as de blessure nulle part, te doucher et aller dormir sans manger.
    - Oui maman. Chuchota-t-il.
    Il aurait voulu lui faire un bisou pour le rassurer, au lieu de quoi il se rendit dans sa chambre pour faire ce qu’on lui avait demandé.

     

    Hunter était assis à la table de la salle à manger-cuisine. Son sac était prêt à côté de lui, sur la chaise qu’utilisait habituellement Manolita lorsqu’elle était à la maison. Il n’osait pas dire un mot. Camile buvait sa tasse de café. Tout aussi noir depuis trois ans. Lui, il jouait avec ses œufs brouillés. Il avait déjà vérifié ne pas s’être arraché d’ongle dans son sommeil, ne pas avoir perdu de dent, de ne pas avoir d’ecchymose et d’avoir une température normale. Ainsi, normalement, il ne devrait pas être malade. Il allait au mieux et il était prêt pour une journée d’école.
    Le souci étant là : il ne voulait pas aller à l’école. Il avait encore tellement de chose à faire pour son loup !
    - Mange.
    La voix de Camile était un peu froide. Hunter comprenait que son parent soit moins gentil avec lui. Il supposait qu’il l’avait mérité. Le mensonge était probablement la seule chose que l’adulte détestait profondément.
    L’insensible à la douleur se décida finalement à prendre son petit déjeuner. Puisqu’il savait que la température de sa nourriture était optimale, l’homme au foyer y faisait toujours attention. Il tira le journal à lui pour le lire. Mangeant son petit-déjeuner, il feuilleta les nombreuses pages.
    Il crut s’étouffer lorsqu’il reconnu un appartement. La seule chose qui avait changé c’était la marque du corps faite à la craie. Il avala une gorgée de jus d’orange pour faire passer un morceau de pain grillé.
    Il entama alors la lecture.

    « Assassinat dans un lieu oublié de tous.
    La police a été alertée par des sans domicile fixe durant la nuit. Ils se plaignaient d’une odeur incommodante à cause de la pourriture et du radiateur et d’un écoulement d’eau qui descendait le long des murs.
    C’est ainsi qu’après une intervention des pompiers, la police est arrivée dans cette petite rue qui tient de l’impasse plus que de la rue. Jadis prospère, ce n’est plus que l’ombre de son ombre. Un nid à parasite.
    C’est ainsi qu’ils ont découvert le corps d’Armand S., 27 ans, criminel multirécidiviste traqué par la police depuis maintenant quatre ans.
    Le monde peut s’estimer heureux que cette vermine soit retournée six pieds sous terre.
     

    Julie Holmes »

    Hunter termina son repas d’une bouchée. Il referma le journal et attendit que Camile aille dans le salon. De petite humeur, il ne prit pas la peine de chercher après des tupperwares restant. Ainsi, il se dirigea vers la poubelle afin d’y vider le plat « de son père ». Il fixait la nourriture disparaître dans le sac noir, la gorge serrée. Avec les difficultés qu’ils avaient, surtout en ce moment, un tel gâchis lui écrasait le cœur au point qu’il en avait la nausée.
    Si seulement Camile pouvait arrêter de croire à ces ridicules fantômes…
    L’adulte revint dans la cuisine-salle-à-manger, sa veste sur les épaules. Il avait son portefeuille son GSM et ses clés.
    - Prêt ? Questionna l’homme.
    - Oui.
    Son parent lui tendit la main. Hunter serra les dents avant de se lever. Il lui prit la main et se laissa entraîner en dehors de l’appartement. Il observa Camile verrouiller la porte puis ils descendirent par l’ascenseur. L’adolescent suivit le mouvement jusqu’à ce qu’ils arrivent finalement à l’école. Sa main enserrait toujours celle de sa « mère ». Il se sentit un peu plus gêné lorsqu’ils arrivèrent aux abords de l’établissement scolaire.
    Le malade aurait tellement voulu pouvoir fuir. Il savait qu’il allait devoir supporter les brimades de ses « camarades » de classes à présent. Il risquait de devenir « le petit chéri à son papa ». Après tout, pour les autres Camile était son père. Il n’était pas tout à fait sûr qu’un tel ressortis l’aiderait à vouloir continuer à suivre les cours.
    - On y est… va à l’école. Et ne te fous pas de ma gueule ! Je suis prêt à faire le pied de grue ici toute la journée ! Et tu le sais !
    - Oui. Je serais sage maman… tu peux rentrer à la mai…
    - Je pense vraiment à attendre. Jusqu’à ce que je puisse à nouveau te faire confiance.
    Nollaig lâcha sa main. L’adolescent s’éloigna de quelques pas. Il se rendit alors jusqu’au bâtiment. Il faudrait qu’il trouve un moyen quelconque pour pouvoir venger Clairsemé. C’était son seul moteur en ce moment. Il savait que sa « mère » ne voulait pas volontairement lui retirer tout ça.

     

    L’être que Hunter s’entêtait à appeler « Dieu » était dans la rue. Il flânait en regardant l’eau qui coulait dans la rivière. Il avait le nez en l’air alors qu’ils passaient dans les allées d’immeubles. Il avait un sourire aux lèvres lorsqu’il voyait des couples enlacés ou encore des enfants qui couraient.
    Il aimait la joie qu’il y avait dans les rues par ces belles journées. Même en automne. Même quand l’hiver était à leur porte. Il pensait à sa tenue si courte. Il ignorait comment il tiendrait dans cette froideur. Il aimait la beauté pure de la neige, elle était si rassurante. Mais il connaissait le froid. Il se doutait de la morsure qui accompagnerait la rêverie hivernale.
    Pour l’instant, il pouvait encore s’amuser, s’émerveiller de la beauté humaine. Il savait que, inversement, l’humanité pouvait être horrible. Mais il y avait tant de chose merveilleuse à voir à côté de cela !
    Il se figea quand une douleur virulente traversa sa cuisse. Il couina et baissa le regard. Tremblant, il remarqua des marques se créer dans sa peau et sa chair. Quarante-deux marques bien nettes. Vingt-et-une au-dessus et, en effet miroir, les mêmes.
    Le sang s’en écoula en long filet, tout à coup. Un sourire pénible passa sur les lèvres de l’ingénu. Il ferma les yeux alors que la douleur continuait de le vriller inlassablement.

     

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  • Écrit le 08/08/2015

     

    Geisha de Arthur GoldenCe voyage m'a assez plu dans la globalité. Si tous les évènements s’enchainent avec une certaine facilité et que notre héroïne voit tout ce qu'elle souhaite se réaliser, rien ne lui tombe tout cru dans le bec. Elle doit faire quelques efforts, doit se rallier à l'avis de sa grande-sœur, etc. Certes, on voit vraiment qu'elle ne peut rater, on réalise que chaque action DOIT arriver à ses fins mais ce n'est pas trop désagréable car chaque chose à une explication correcte.

    Les personnages font très vrais tant dans leur caractère que dans leur physique ou, pour une fois, on ne trouve pas que des personnages beaux. Même dans les Geishas ne sont pas, comme par miracle, sublime.

    L'histoire semble très bien renseignée et on a l'occasion de découvrir de nombreuses choses. Malheureusement, les explications sont longues et surviennent un peu trop souvent, même à des moments inopportuns, ce qui nous casse notre lecture. Je reproche aussi le fait que l'auteur passe son temps à mettre entre guillemet les termes japonais et ça fait bien vite beaucoup de guillemet et fait une mise en page très désagréable...

    Petit aparté sur l'héroïne... au fil de l'histoire, elle devient de plus en plus insupportable et prétentieuse, je trouve. À la fin, elle m'énervait et me semblait plus qu'incohérente. J'ai été tout à fait ravir de finir l'histoire pour ne plus avoir à la supporter...


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  • Écrit le 13/08/2015

    Ma vie de Geisha de Mineko IwasakiJ'ai commencé cette histoire avec une certaine excitation, tenant à achever mes informations sur le milieu pour une nouvelle à venir. J'ai été déçue...

    La première chose que j'ai faite lorsque j'ai eu fini le livre (après avoir dormi !) fût de vérifier que cette Geiko (pour reprendre ces termes) existait bien. Parce que son histoire était emplie d'une irréalité dérangeante. Elle réussit presque tout ce qu'elle entreprend, elle agit contre les règles des geikos qu'elle vient de donner mais rien ne lui arrive. Malgré le fait qu'elle s'en prenne à ses clients, qu'elle est désobligeante... Et sur le fait de sa désobligeance, j'y reviens... L'histoire m'a énormément déplu par le caractère de ce personnage. Sûre d'elle, hautaine, mauvaise... J'ai eu plus d'une fois envie de lui donner des baffes. Surtout lorsqu'elle donnait des ordres à tout le monde dans sa jeunesse...

    J'ai été troublé par le manque de temporalité de l'histoire. Plus d'une fois, l'auteur revient en arrière sur un point, puis va dans le futur avant d'enfin revenir dans le présent. À un tel point que lorsque je lisais, j'avais un détachement constant ignorant qu'elle âge elle avait, où elle en était dans sa formation, etc.

    Bien que je connaisse l'univers, que je m'y connaisse dans le Japon, leurs us, leurs coutumes et, surtout, leurs noms, j'ai été constamment perdue. Certaines dénominations utilisées changeaient (comme le nom des "okobos" qui s'appellent autrement la première fois qu'on en parle).


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  • Le Bruit Mystique retentit. C’est le moment. C’est maintenant. Sur le haut de son talus, elle lève les yeux. Elle tombe la première.
    Le bruit est assourdissant. Ballet intime entre Mort et Vie.
    Ses antennes tremblent en La regardant. Bientôt suivie de toutes ses quelques autres amies. Le Grand Seau Vert les libère avec parcimonie.
    Et elle guette. Les Gouttes d’Eau seront-elles les envoyées du Dieu des fourmis ou plutôt de son détestable rival, le Diable.
    Ces gouttes les noieront-elles ou leur offriront-elles boisson et nourriture dans des temps à venir ?


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